LONDRES / 7 -10 juin 2024 / Virée de bord entre mère et fille /
Ça y est ! Here we go ! Après plus de deux ans d’attente, nous voilà confortablement installées, ma mère et moi, dans les larges sièges de l’Eurostar. Nous fuyons l’insoutenable grisaille française pour le climat maussade bien plus tolérable de l’Angleterre (un tube de crème solaire et une jupe longue tout de même glissés dans nos bagages). Nous connaissons déjà Londres. Nous avons visité la capitale ensemble et séparément, il y a de ça cinq, huit et dix ans. Pour moi, ce voyage est l’occasion d’assembler les pièces d’un grand puzzle de souvenirs. C’est une sensation grisante, je trouve, de parvenir à superposer aux visions candides et incertaines que l’on éprouve à la première visite d’un endroit, une maille plus dense et réaliste, acquise à force d’expérience.
Nous débarquons sur les coups de 10h, gare St Pancras. Cet immense toit vitré, je m’en souviens ! La statue là-bas par contre… Ah bon on ne passe plus la douane à l’arrivée ? La dernière fois pourtant… Allez viens maman, on va prendre le bus dehors. Oui oui le 91, c’est écrit sur Google Maps. Ah non attends l’arrêt n’est plus desservi. Le métro alors ? Ok, bon, on repassera pour la force de l’expérience.
Jour 1 ⸱ West end
- Arrivée en matinée gare St Pancras
- Crochet par notre hôtel Strand Palace
- Déjeuner dans la crypte de l’église St Martin-in-the-Fields
- Promenade à travers St James’s Park jusqu’à Buckingham Palace
- Shopping au cœur de Leicester Square (M&M’S !!!!!!)
- Passage par Chinatown jusqu’au British Museum
- Visite du musée
- Tea Time à Covent Garden
- Passage à l’hôtel
- Fish’n’chips chez Poppies Soho
Nourrir le corps et l'esprit
Connaissez-vous la drôle d’église St Martin-in-the-Fields ? On entend parfois que la religion est une nourriture spirituelle, ici, je vous assure qu’il s’agit de nourriture tout court ! Au cœur de Londres, et non pas d’un vaste champ comme le laisserait présager son nom, St Martin déploie une volée de marches en colimaçon qui nous conduisent directement dans sa crypte. Le ton est donné dès le bas de l’escalier : bienvenue à la boutique souvenir ! Passés les portes et l’étonnement, nous voilà dans une cantine bon marché. Munissez-vous d’un plateau, d’un verre d’eau, et faites la queue ! L’Eglise garde toute-foi son rôle d’accueil des malheureux. Ces quelques salades à peu de frais sont une bénédiction dans une ville où l’on peine à trouver de la verdure à se mettre sous la dent !
Promenade à l'anglaise
Après le réconfort, place à l’effort ! Il est temps de partir à la redécouverte de Londres, emmitouflées dans nos petites laines, tout juste suffisantes face au vent qui souffle. Nos pas nous mènent assez naturellement jusqu’à St James’s Park. Un détail me tire de ma légère torpeur digestive : que de fleurs ! De jeunes jardiniers s’activent sous l’œil inquisiteur d’un homme en costume, badge au cou. Au royaume de l’éclectisme, cette rigueur florale détonne. Moi qui croyait que la philosophie des jardins à l’anglaise c’était plutôt Let It Bee… Nous continuons notre balade sous l’œil goguenard de pélicans égarés, pour nous rendre compte que nous arrivons presque sans le vouloir devant Buckingham Palace. Comme quoi, tous les chemins mènent à Diana. Un p’tit tour du Victoria Memorial et puis s’en vont, nous redescendons tranquillement The Mall en direction de Waterloo Place. Comme c’est curieux, ces barrières partout… entre la poésie des fleurs et la rigueur du métal, il faut choisir !





Piccadilly, quel cirque !
Des publicités lumineuses sur les façades des buildings ? Des carrosses ultra kitsch menés par des hommes d’affaire en doudoune ? Des danseurs de hip-hop, des statues vivantes et des cracheurs de feu ? Ne cherchez plus, bienvenue à Piccadilly Circus. C’est là que mes souvenirs topographiques choisissent de perdre les pédales pour de bon. Après calme, luxe et volupté dans les jardins de la reine (enfin du roi), cette avalanche d’informations ensevelit mes espoirs de jouer les guides durant le reste du voyage. Ma reine mère, elle, n’a pas perdu le nord, et remonte à toute vitesse Coventry Street en direction d’un lieu mémorable dans l’histoire de notre famille… la boutique officielle de M&M’s. L’immense magasin dédié aux petits bonhommes en chocolat sera heureuse de vous accueillir sur l’un de ses quatre étages. Petit conseil : le plus intéressant se trouve au -1, où de gigantesques tubes en plastique regorgent de bonbons sagement rangés par ordre alphabétique. Une mise en garde toutefois : au royaume du sucre, la note peut s’avérer salée !
Le British Museum : une visite historique !
C’était notre seul regret lors de notre précédent séjour en 2019, ne pas avoir pu entrer au British Museum, pour cause de valises interdites. Cette fois-ci, nos bagages attendent sagement à l’hôtel, et seul un sac M&M’s nous encombre légèrement. Nous rejoignons docilement la looooooooongue file d’attente… et la remontons finalement à toute allure grâce à la carte ICOM de l’archéologue en cheffe de la famille !
Bon à savoir !
Bien que le British Museum soit gratuit pour tous (sauf expositions temporaires payantes), il est indispensable de réserver son ticket à l’avance et de respecter l’horaire indiqué, voire d’arriver en avance. La file d’attente est très longue, et pas franchement agréable dans l’odeur d’essence du camion-snack qui tourne. Une fois le portail passé, une autre queue serpente jusqu’au contrôle des sacs… Privilégiez donc un créneau peu prisé. Et surtout, surtout, pas de valises ! Vous ne pourrez pas rentrer.
Une fois à l’intérieur, on s’émerveille. L’architecture révèle ingénieusement un plafond de verre au sein d’un bâtiment datant de 1832. Celui-ci est construit sur les plans d’un temple romain (style dit Greek Revival (« renaissance grecque ») qui caractérise les nombreuses répliques de bâtiments méditerranéens qu’on voit se propager en Europe dès le XVIIIème siècle). Le musée étant peu ou prou l’équivalent du Louvre, il nous faut choisir quoi voir. Nous tombons rapidement d’accord sur la Grèce antique. Il faut dire que la renommée du musée tient en grande partie à la pierre de Rosette et aux fameux marbres du Parthénon, aussi célèbres pour leur qualité exceptionnelle que pour les questions de spoliation qu’ils soulèvent (le gouvernement grec exige aujourd’hui leur retour à Athènes). En chemin, nous faisons une découverte qui volera finalement la vedette à la civilisation hellénistique. Le musée abrite plusieurs salles consacrées au premier empire du monde, l’empire assyrien. Je suis ravie de reconnaître les représentations d’Assurbanipal (685 – 631 av. J.-C.), roi célèbre pour ses exploits guerriers et pour la bibliothèque qu’il fait construire à Ninive, alors capitale d’Assyrie. Cette bibliothèque contenait notamment les tablettes de l’Epopée de Gilgamesh, mythe antique absolument capital dont la Bible s’est inspirée. Les tablettes sont découvertes en 1872 par l’assyriologue britannique George Smith et participent du lever de voile sur cette grande civilisation, souvent éclipsée par l’étude de l’Egypte, de la Grèce ou de la Rome antique. Et pour celles et ceux qui n’ont pas eu la chance de suivre le cours dédié à La Sorbonne, laissez-moi vous conter de source sûre (le professeur ès Gilgamesh) que George Smith se serait déshabillé de bonheur à la découverte des fragments… Nous repartons près de deux heures plus tard complètement émerveillées et fières d’avoir dépoussiéré nos licences d’histoire mutuelles. Un seul conseil si vous hésitez encore : foncez !

Covent Garden : cerise sur le muffin
Nos pas nous ramènent doucement sur le chemin de l’hôtel. La journée s’étire paisiblement et nous laisse au bonheur de flâner un peu après notre shot de culture quotidien. Covent Garden surgit au détour d’un pâté de maison. L’humeur est au lèche-vitrine. Bijouterie, opticien chicos, chaussettes bariolées… l’ensemble est joli, mais rien ne nous donne vraiment envie. C’était avant de passer devant l’enseigne de Whittard ! De charmantes jarres exposent une infusion colorée que l’on goûte gracieusement. Au sous-sol, la dégustation continue entre thé, chocolat et café. Nous craquons finalement, chacune suivant ses penchants (tisane aux fruits rouges pour l’une, café aux truffes chocolatées pour l’autre). « Where would you recommend to go for a nice tea time ? » I ask. « Brigit’s Bakery » she says.
Brigit's Bakery, tendre jardin d'Eden
Brigit Brigit Brigit… Il s’agit sûrement là de l’un de nos plus précieux souvenirs du voyage. On entre. Il sourit. On s’assoit. Il sourit toujours. Nous tend la carte. Un scone pour deux s’il vous plaît, et des boissons chaudes. Il sourit encore. Le temps semble suspendu dans ce petit salon de thé dirigé d’une main de soie dans un gant de velours par un serveur joyeux comme on n’en fait plus. Du coin de l’œil, nous l’observons couper des parts de gâteau, accueillir les clientes et remplir des coupes de prosecco. Cet homme-là n’arrête pas de sourire. Et que dire de ce scone… de cette crème… et de cette confiture… mais surtout de cette crème… Pas un mot, je suis au paradis.

Fish'n'chips chop chop
Pour finir la journée en douceur, j’ai réservé a table for two chez Poppies, dans le quartier de Soho. De l’assiette au décor, le charme anglais est partout. Nous dégustons un ex-cel-lent fish and chips dans un petit restaurant, genre rétro avec une boule à facette et des tabourets en formica orange. Le poisson est tendre, la panure est exquise et peu grasse, la portion de frites, généreuse. Quand à la bière, elle se boit comme du petit lait. Le quartier est tout aussi agréable. Les pubs tradi côtoient les enseignes queer. Les looks sont extravagants, les gens rient, il y a de la couleur dans la rue. Un peu hébétées après notre longue journée, c’est tout naturellement que nous nous perdons sur le chemin retour de l’hôtel. Qu’importe, c’est les vacances.







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